Plage atlantique ou palmeraie, riad ou tente berbère, clameur des villes ou silence du désert... Pour un week-end ou une saison, un premier ou un énième voyage, le Maroc emporte loin.
Medersas, mosquées, mausolées et palais... Mille et un voyages ne suffiraient pas à épuiser les splendeurs des villes impériales du Maroc. Nichée dans les montagnes du Moyen Atlas, Fès est tout à la fois rugueuse et quotidienne, raffinée et voluptueuse.
Fès est artisane, façonnée par les maalem, ces maitres-artisans - babouchiers, tisserands, orfèvres, chaudronniers...- qui de génération en génération perpétuent les gestes et les savoir-faire. Dans le quartier des tanneurs, les hommes plongent des peaux de chèvres dans de hautes cuves safran ou indigo. Plus loin, les dinandiers martèlent le cuivre à même les trottoirs; les menuisiers œuvrent dans l'odeur entêtante du cèdre. Fès est spirituelle, peuplée à l'origine par des citadins érudits, réfugiés andalous et kairouanais. On y visite la plus ancienne université au monde, qui accueillit le philosophe, théologien, juriste et médecin Averroès.
On y parcourt caravansérails et jardins andalous, et dans les salles de lecture des medersas, on savoure le calme qui contraste avec la clameur des quartiers artisans.
Une mosaïque de villes
Meknès, c'est "le Versailles du Maroc", qui dévoile ses palais de marbre, ses jardins d'agrément et sa place El-Hédime qui, à la tombée du jour, fourmille de bateleurs et de cracheurs de feu. Rabat, elle, fait face à l'océan, mais ses maisons bleues et blanches et sa douceur de vivre évoquent plutôt la Méditerranée, Grèce ou Tunisie.
Marrakech est berbère et saharienne. Derrière ses murailles ocre et ses rangées de palmiers, la médina dévoile sa vie de village, ses échoppes, ses fours à pain partagés, ses marchés, ses zaouïas (édifice religieux) et ses riads. Ici, on aime aussi goûter aux plaisirs contemporains, un soin au hammam ou une virée shopping, un verre dans les jardins Majorelle.
À Taroudant, architecture vernaculaire berbère et "jardins de demain" mêlant cactus, graminées et euphorbes fusionnent en de belles demeures.
Et à deux pas, la visite du musée Yves Saint Laurent, dont l'architecture compacte s'inspire de la maison arabe. Les créations du couturier, des premiers smokings à la robe Mondrian, y sont mises en lumière dans des salles d'un noir profond.
Salva Lopez
Un road-trip essentiel et enchanté
Aux portes de Marrakech, l'immensité du désert fait immédiatement oublier l'effervescence et le bruit. On prend la Route 203, à l'assaut du Haut Atlas. Au col de Tizi-n-Test, à 2100 mètres d'altitude, porte d'entrée de la province de Taroudant, on s'arrête pour la vue, indiciblement profonde. La descente est raide. Une fois dans la plaine, on accède à Taroudant.
La ville est plébiscitée par les architectes et les paysagistes, qui y déclinent l'architecture vernaculaire berbère et expérimentent des "jardins de demain", cactus, graminées, euphorbes. On savoure leur savoir-faire dans une maison d'hôtes au cœur d'une oliveraie. Et dans les villages berbères alentour, on va chiner poteries et vanneries, semblables à celles qui habillent leurs belles demeures. Sur la route à nouveau, la progression de village en village, à l'ombre des palmiers, donne tout son sens au voyage en voiture. Un peu plus loin, une halte enchantée dans la vallée du Souss, dans l'arrière-pays d'Agadir. Un hameau haut perché auquel on accède à pied, deux ruelles, une dizaine de maisons basses blanchies à la chaux. Et une maison d'hôtes en pierres sèches, refuge très privé tout en luxe discret, avec vue plongeante sur la plaine et ses milliers d'arganiers et, pour seuls voisins, des ânes, des chèvres et leurs bergers. Il faut partir.
La route emprunte les pistes entre erg, étendues rocailleuses ponctuées de figuiers de Barbarie et oasis verdoyantes. Le spectacle est total. Bientôt, c'est Skoura. En balade dans les jardins de sa palmeraie, entre oliviers, amandiers et figuiers, on se prend à rêver: poursuivre la route, continuer le voyage un peu plus loin, vers la vallée du Dadès et ses gorges spectaculaires...
Des eaux de l'Atlantique aux sables du Sahara
De Tanger à Dakhla, la côte atlantique s'étire sur plus de 2000 kilomètres et invite au voyage. Et la route de serpenter dans la montagne, au cœur des paysages blonds du Rif. Puis, au détour d'un virage, Chefchaouen, village posé au-dessus des nuages dans un nuancier de bleus.
Essaouira a le goût du vent et du soleil... Il faut arpenter ses remparts avant de tourner le dos à l'océan pour rejoindre la médina, flâner, se poser, siroter un thé à la menthe.
Ruelles sinueuses et pentues, maisons indigo ou cobalt: une médina à ciel ouvert, hautement instagrammable. Un peu plus loin, entre Rif et Méditerranée, Tétouan a la nonchalance d'une ville andalouse - elle ne s'anime tout à fait qu'en fin d'après- midi, paseo boulevard Mohammed-V et anisette à la terrasse des cafés, où l'on parle arabe et espagnol à l'ombre des platanes.
Aylaan Moodysson
À la croisée des mondes
Au détroit de Gibraltar, à la pointe extrême de l'Afrique, Tanger vit aussi à l'heure espagnole. Bientôt, on quitte sa casbah cosmopolite pour basculer définitivement vers l'Atlantique. À 45 kilomètres au sud, Asilah étire les remparts de sa vieille ville face aux vagues océaniques, dans une atmosphère arty et bohème.
Saisissant contraste à Casablanca. La capitale économique du pays est bruyante et congestionnée. Mais la mal-aimée, théâtre au début du XXe siècle d'une des plus fécondes aventures de l'urbanisme moderne menée par les architectes des Beaux-Arts de Paris, recèle un trésor. On y découvre le plus riche ensemble Art déco au monde - de la Banque du Maghreb au Rialto, où s'est produite Edith Piaf.
Après une halte à El Jadida, ancien comptoir portugais, la route reprend le fil de l'océan jusqu'à Oualidia, où l'on savoure fruits de mer et verre de blanc face à la lagune. Elle surgit soudain, au détour d'un virage : Essaouira la blanche émerge de la forêt d'arganiers comme un mirage.
Escale hippie chie et spot de glisse, "La Bien Dessinée" en berbère est aussi l'une des plus belles villes fortifiées d'Afrique du Nord. Fraiche, vivifiante, elle a le goût du vent et du soleil, et peu importe le nombre de visites, la magie opère toujours. Il faut arpenter ses remparts avant de tourner le dos à l'océan pour rejoindre la médina, flâner, se poser, siroter un thé à la menthe, observer le mouvement de ses habitants. Puis, s'installer un peu plus loin, entre littoral et campagne. Murets de pierres sèches, horizon blanc et bleu d'écume. Une paillote et quelques chaises longues, une terrasse flanquée d'une tente berbère, de nattes et de coussins: une belle halte, entre glisse et cavalcades sur la plage. Poussé par les alizées, on peut poursuivre plus au sud, croisant ibis, flamants et vans colorés de surfeurs, jusqu'à Dakhla, aux portes du Sahara occidental.
Maison Brummell Majorell/Ely Sanchez
In the mood
Un voyage terriblement enivrant, qui sent la fleur d'oranger, le cuir, le cumin... Et invite à chercher l'ombre d'une oasis, la fraicheur d'un jardin, le cœur d'un riad... Vous êtes matinal à Marrakech, seul moyen d'éviter les foules et le soleil souvent écrasant.
Les amateurs de déco iront faire le plein de tapis berbères, lanternes et céramiques mauresques chez Mustapha Blaoui, tandis que les addicts du shopping fileront aux souks ou à la boutique de l'hôtel El Fenn. L'après-midi sera consacré à un massage relaxant dans l'exceptionnel spa du Royal Mansour ou à quelques longueurs dans l'une des piscines du Beldi Country Club. Puis, vous prenez la route, l'immense richesse du Maroc s'offre à vous : à l'est, les montagnes, le désert, le silence. Au sud, les spots de surf de Taghazout vous appellent. En remontant la côte ouest, vous découvrez des vallons peuplés d'arganiers, et le sublime Jardin des Douars, un hôtel extraordinaire. L'incontournable Essaouira apparait. Puis, Rabat et sa casbah, Asilah et, tout au nord, Tanger.
Andri Klopfenstein / Unsplash.com
Photographie de couverture : Salva Lopez