Avec Jean-Pierre Chanial, journaliste, écrivain et grand voyageur, Michel-Yves Labbé, président de l'application Départ Demain, Florent Verardi, conseiller Amérique Latine et spécialiste de l'Argentine chez Voyageurs du Monde.
Les charmes et l'immensité de l'Argentine
« C'est un pays tellement vaste – 3700 km du nord au sud et 1400 d'est en ouest - que chacun va y trouver son bonheur : des stations balnéaires, des montagnes invraisemblables jusqu'à 7000 m d'altitude, des étendues infinies, des villes de grand charme, une capitale bouillonnante et bourdonnante... », démarre Jean-Pierre Chanial, pour qui il est impossible de tout voir en un seul voyage. Pourtant, Voyageurs du Monde propose la traversée du pays en une fois « mais il faut avoir le temps et prévoir 23-24 jours sur place », commente Florent Verardi. L'un des charmes de l'Argentine, ce sont aussi les gens, « une sorte de panel de sources européennes qui se retrouvent dans les noms, des gens qui ont ajouté un immense sentiment de liberté à leurs origines, sans doute grâce à l'espace », comment Jean-Pierre Chanial.
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Michel-Yves Labbé est particulièrement fan de la région de Salta dans le nord-ouest et pense aussi qu'on a tort de tout vouloir faire d'un coup : « D'abord, il y a un problème de saisons, on ne peut pas avoir du beau temps partout au même moment ! »
Quand partir et combien de temps ?
Valérie Expert enchaîne naturellement sur le meilleur moment pour partir. « Pour la Patagonie, Voyageurs du Monde propose des séjours entre octobre et avril. Pour ceux qui choisissent la traversée nord-sud ou sud-nord, les mois idéaux sont octobre et avril pour croiser les deux saisonnalités. Pour la région nord-ouest, on propose l'été en France, de mai à octobre », répond Florent Verardi. Il signale aussi qu'Air France vole directement, de nuit, jusqu'à Buenos Aires et pour un premier voyage, les invités de Valérie Expert sont d'accord : il faut au moins 15 jours pendant lesquels on combine Buenos Aires, Iguaçu, le nord-ouest et la Patagonie. « Il faut prendre des vols intérieurs, et ne pas perdre de temps sur les routes », précise Michel-Yves Labbé.
L'Argentine, un pays à part
Valérie Expert voit l'Argentine comme un pays à part. Florent Verardi lui associe le Chili, avec lequel il trouve que l'Argentine a des similitudes. « C'est souvent un pays d'entrée et de sortie quand on va en Argentine, ce sont un peu des pays jumeaux en matière d'espace, d'intensité et je les associerais pour certains voyages ». Michel-Yves Labbé souligne que l'Argentine est à part car il y a peu d'autochtones : « C'est une civilisation totalement européenne, ça n'a rien à voir avec le Brésil, la Bolivie, le Pérou... Et Buenos Aires, c'est vraiment le petit Paris ».
Buenos Aires
C'est dans la capitale que le périple de l'émission continue, « une capitale qui mérite d'y passer trois ou quatre nuits. On est obligé de proposer du classique : il faut voir les grandes avenues, Ricoleta et différents quartiers. En revanche, on travaille sur place avec des amis locaux qui ont des spécialités et qui vous emmènent à leurs adresses rencontrer des artistes, des musiciens... Cela permet de découvrir Buenos Aires sous un autre angle », explique Florent Verardi. Ce qui plaît le plus à Jean-Pierre Chanial, c'est l'ambiance, « toujours joyeuse, animée et sans façons ». Il parle aussi de bienveillance naturelle, oubliée chez nous. Il n'y a pas de réaction de méfiance instinctive. Au contraire, c'est immédiatement le partage ». Michel-Yves Labbé, lui n'est pas aussi enthousiaste que les autres invités de Valérie Expert : « J'aime bien Palermo, le quartier un peu bobo, intellectuel, artistes, un peu à l'écart du centre. Le reste, je ne suis pas très enthousiaste. Mais sur Palermo, il y a des tours à faire sur l'architecture locale, les villas sont magnifiques ». Il mentionne aussi l'ambiance, surtout le soir et confirme l'aspect sécuritaire mais évoque aussi la pauvreté et l'écart entre les riches et les pauvres en donnant l'exemple d'un énorme bidonville au bout de la grande avenue de Buenos Aires de l'autre côté du Four Seasons. Florent Verardi revient sur Palermo, « le quartier où il faut séjourner, certaines villas sont converties en hôtels boutique, il y a des librairies, des bars, des restos ».
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Et la crise ?
Valérie Expert évoque la crise vécue par le pays à la fin des années 90 et au début des années 2000. « Le gouvernement a toujours compris que le tourisme ne pouvait qu'apporter des points de croissance, commente Florent Verardi, ils ont tout de suite remis le pied à l'étrier pour promouvoir le pays, en communiquant notamment sur la Patagonie ». Pour Michel-Yves Labbé, c'est un peu de colère qui reste de cette période : « Je voyais que la monnaie s'écroulait mais dans le secteur du tourisme, les prix ne baissaient jamais parce que tout le monde magouillait ! » Selon lui, cette attitude a pénalisé le tourisme : « S'ils avaient suivi la dévaluation, ce serait devenu un pays extrêmement intéressant pour ses tarifs ».
Milonga et viande de la Pampa
Après la crise, la fête... « Qu'est-ce qu'une Milonga ? », interroge Valérie Expert. « Une sorte de guingette dans des bars ou d'autres endroits, répond Florent Verardi, on danse au son d'un orchestre ou d'un DJ, on se retrouve entre amis ». Et d'après Jean-Pierre Chanial, « on n'y danse pas que le tango mais aussi sur de la musique disco, on fait des karaokés, bref, c'est la fête dans une ambiance « latina » et il y a un parallèle avec la gastronomie ! »
La conversation s'oriente vers les incontournables de la cuisine argentine comme les lomos, « des steaks de viande absolument fabuleuse qui vient des haciendas de la Pampa, la meilleure du monde ! N'oublions pas non plus les fruits de mer... ». Jean-Pierre Chanial est interrompu par Michel-Yves Labbé qui n'est pas convaincu : « Je ne suis pas fan de leur viande ». Il trouve qu'il y a meilleur ailleurs. Florent Verardi intervient : « La viande a une renommée internationale mais personnellement je déteste la manière dont ils la cuisent. C'est ultra-cuit. Au restaurant, demandez une cuisson vuelta y vuelta - aller retour – pour avoir une chance d'avoir de la viande saignante ! »
Partir en famille...
Pour partir en famille, Florent Verardi conseille Buenos Aires, la péninsule de Valdes pour la faune et Iguaçu, unique au monde. « Evidemment, c'est très touristique mais on peut trouver des petits logements dans la forêt avec des piscines pour les enfants, ce n'est qu'à deux heures de vol de Buenos Aires, pareil pour la péninsule de Valdès ». Aux chutes d'Iguaçu, Michel-Yves Labbé conseille de dormir au Belmont : « Le soir on est tranquille, on a les chutes pour soi ».
Au nord-ouest, Michel-Yves Labbé décrit la charmante petite ville de Salta : « On monte dans la Sierra, on découvre des villages indiens, il y a une grande boucle à faire : vous montez dans les Andes à la frontière avec la Bolivie et le Chili. Vous redescendez de l'autre côté vers les Salinas Grandes. Vous pouvez revenir par l'autre côté, par un village qui s'appelle San Antonio et vous redescendez sur une vallée magique sur Salta ou Cachi. Là, vous pouvez prendre un bout de la route 40, mythique qui descend jusqu'en Patagonie ou sur Cafayate, un endroit protégé du vent où l'on fait du vin et où c'est le printemps éternel. Pour le tour complet, comptez quatre ou cinq jours dont deux à Salta ».
… ou en voyages de noces
Et oui, l'Argentine est aussi une belle destination de jeunes mariés, « pour ceux qui aiment les grands espaces, les estancias de charme, les rencontres, l'Argentine est idéale pour un voyage de noces un peu à contre-courant », révèle Florent Verardi.
La Patagonie
« Si on va en Argentine, on va en Patagonie. Il faut aller au Perito Moreno et quand vous êtes au pied du glacier, vous l'écoutez, il bruisse, il craque, ça tombe dans l'eau... C'est un spectacle extraordinaire », raconte Michel-Yves Labbé. Pour être complètement à contre-courant, Florent Verardi défend la Patagonie en hiver : « Il y a des avantages : beaucoup moins de vent, de monde et la Patagonie est sublime parce qu'elle est blanche... »
Découvrir les estancias
« Passer une ou deux nuits dans une estancia, grande propriété agricole, est une aventure fantastique. Choisissez-en une que l'on parcourt à cheval. Même sans être un cavalier émérite, vous accompagnez la vie de l'estancia. C'est du bonheur total tant qu'on aime la nature ! », conseille Jean-Pierre Chanial qui parle aussi d'expérience de partage car il ne s'agit pas de conditions hôtelières classiques. On vit dans la ferme principale et on partage tout avec les propriétaires et ceux qui travaillent dans la ferme. Florent Verardi rebondit sur la notion d'estancia de charme et cite la Bamba de Areco à deux heures et demi de Buenos Aires, une estancia toute restaurée, spécialisée dans les chevaux qui a même son équipe de polo, « un endroit idéal pour terminer son voyage de noces en Argentine !», garantit Florent Verardi.
Des spectacles insolites
« En Argentine, on peut se faire deux petits plaisirs : aller à un match de polo ou un match de foot à la Bomboniera. Là-bas, c'est 50 000 personnes en furie !», explique Jean-Pierre Chanial. Il met toutefois les auditeurs en garde. Le stade est dans un quartier peu sur. Il faut donc se fondre dans la foule et bien sûr supporter Boca Junior ! « Voyageurs du Monde peut s'occuper de prendre les billets et d'organiser aussi les trajets pour le stade », souligne Florent Verardi. Pour les matchs de polo, direction Palermo : « C'est là que se trouve le stade de polo où se déroulent les plus grands événements, dont celui de novembre, une sorte de championnat d'Argentine de polo. L'engouement du public est exceptionnel », raconte Jean-Pierre Chanial avant de mentionner une deuxième option : 'aller dans une estancia assister à des matchs ou des entraînements d'équipes locales. On peut même vous proposer de participer. « Tout cela dans l'esprit de partage», insiste Jean-Pierre Chanial. Autre excursion originale au départ de Buenos Aires et proposée par Michel-Yves Labbé : « une balade dans un milieu tropical sur le fleuve Tigre, le long d'habitations anciennes et coloniales ».
La carte postale de Michel-Yves Labbé : La péninsule de Valdes
Michel-Yves Labbé emmène les auditeurs dans la péninsule de Valdes au nord de la Patagonie. « On y va en prenant une ligne intérieure depuis l'aéroport domestique de Buenos Aires et on arrive à Trelew. On prend sa voiture de location pour remonter vers le nord à 45 minutes de route pour Puerto Madryn, une ville à l'entrée de la péninsule que je trouve sans intérêt », commence Michel-Yves Labbé. Elle a pourtant le mérite d'avoir des hôtels et d'excellents fruits de mer. Il conseille ensuite de poursuivre son chemin jusqu'à l'entrée du parc national de la péninsule de Valdes. « A partir de là, il n'y a que de la piste à perte de vue jusqu'au petit port de Puerto Piramides qui ne vit que pour et par les baleines », poursuit-il. Des baleines qui sont dans le coin de juin à décembre, surtout les mois d'été. « On vous emmène en zodiac et vous allez les voir de très près dans le Golfo Nuevo». Michel-Yves Labbé conseille de passer la nuit à Puerto Piramides et de prendre la croisière du soir « plus longue et qui offre les plus belles lumières ».
« Vous verrez aussi beaucoup d'éléphants de mer sur la plage vers Ponta Delgada jusqu'à la pointe nord », enchaîne-t-il avant d'entraîner son public vers les Salinas, dont une est à 70 m en-dessous du niveau de la mer. « On tombe nez à nez avec des guanacos – des lamas sauvages -, des ânes sauvages, des autruches et des manchots ! Arrivé à la pointe nord, vous trouvez un phare, un café et la vue sur la plage d'Orcas Beach où les otaries et les lions de mer viennent prendre le soleil avec leurs bébés. C'est là aussi que les orques viennent déguster leur repas favori : le bébé otarie ou lion de mer... ». Michel-Yves Labbé explique leur technique, unique au monde : « Ils arrivent sur la plage, s'échouent pour attraper les bébés puis ils basculent à grands coups de nageoires et de queues pour retourner à l'eau. Ensuite le bébé otarie est relâché dans l'eau pour que les jeunes orques apprennent à l'attraper. Il passe un sale quart d'heure avant d'être achevé par la mère orque... » Et si vous voulez avoir une chance d'assister à ce spectacle tragique, il faut miser sur le mois de mars. Il suggère de continuer le voyage vers Punta Tumbo où se trouve une pinguinera – réserve de pingouins - peuplée de 500 000 à 1 million de manchots qui y séjournent de septembre à mars. « Enfin, avant de quitter la péninsule, passez par l'irrésistible ville de Gaiman, fondée par des immigrants gallois au XIXème siècle. Ils cultivent la nostalgie du pays : maisons à colombages, salons de thé, pubs, bref un Pays de Galles austral... Alors, avec les manchots, les otaries, les lamas, les autruches, les baleines et les Gallois, vous allez adorer ! »
Pour dormir, Michel-Yves Labbé recommande Las Restingas à Puerto Piramides « où l'on voit les baleines de sa chambre » et une estancia de charme, Rincon Chico, perdue au bout de la péninsule sur 15 km de plage privée... Valérie Expert conclut l'émission en conseillant la lecture du livre Le Dictionnaire Insolite de l'Argentine d'Anne Papazoglou, aux éditions Cosmopole.
Photographie de couverture
PAULINE CHARDIN