Chili

Des hauts plateaux chiliens

Des hauts plateaux chiliens

Les grands télescopes installés au Chili permettent d’observer la naissance de l’univers jusqu’à nos jours. Chassant les photons de lumière au-delà du visible, ils détectent désormais une multitude de planètes inconnues orbitant autour de milliards d’autres soleils.

 

Hémisphère Sud, tropique du Capricorne, Centre Radio-astronomique ALMA, Avril 2015, 20H locale ; situé à 5 000 m d’altitude, le bureau de contrôle climatisé du plus fantastique observatoire radio-astronomique jamais conçu, s’anime avec le crépuscule. Le Staff permanent issu de 18 nationalités s’apprête à démarrer les opérations techniques de la nuit à venir.

Plantés sur le plateau glacé et silencieux du Chajnantor, dominant le salar Chaixas d’Atacama et jouxtant la montagne magique du Licancabur, 66 télescopes géants sont progressivement mis en batterie. Leurs coupoles réfléchissantes de 12 mètres de diamètre pivotent lentement vers la voûte céleste la plus éclatante du monde, dépourvue de pollution lumineuse, de turbulences de chaleur, ou de nébulosité.

 

Télescope au Chili

Source : Instagram

 

Sous chaque coupole, les capteurs trempés dans des bains d’azote liquide à -180 degrés, enregistrent les moindres signaux radios venus du ciel. L’ensemble des données est transporté en temps réel par 13 000 kilomètres de fibres optiques jusqu’aux puissants calculateurs confinés 2 000 mètres plus bas.

Par la méthode dite d’interférométrie, toutes les données sont assemblées en une seule image correspondant à un cliché pris par un télescope de… 16 kilomètres de diamètre !

Cette nuit, comme les 365 autres passées et celles à venir, les télescopes seront pilotés à distance sur une liste de points à observer dans le ciel. ALMA signifie Atacama Large Millimiter Array ; en clair ce centre unique au monde sera capable en 2015 d’aller photographier la surface des mondes extrasolaires, c'est-à-dire des planètes orbitant autour d’autres soleils que le nôtre ! Déjà à ce jour, une trentaine de coupoles sont installées et les résultats dépassent les espérances. L’origine des mondes est enfin portée à notre compréhension.

 

Observatoire astrologique chilien

Source : Instagram

 

Ces instruments reculent en effet d’une manière inimaginable les frontières de la connaissance. L’étude des étoiles permet par exemple de vérifier qu’elles sont à l’origine des atomes complexes dont nous sommes nous-mêmes, êtres humains, constitués.

Lorsqu’on regarde les étoiles, la nuit, en écoutant la Nature, on observe tout simplement, … nos aïeux ! Nous sommes des « poussières d’étoiles » comme aime à nous le rappeler Hubert Reeves. Fouiller l’Univers avec nos lentilles d’argent revient à décoder la langue de la Nature, à comprendre que nous sommes tous faits des mêmes atomes, que les frontières de nos pays, nos races, nos communautarismes, ne sont que des obstacles inventés pour se combattre, en oubliant l’essentiel : préserver ensemble le cadeau de la vie.

Le résultat observé sur ce chantier, financé par les USA, les 14 membres de l’ESO, le Japon, et le Chili, est époustouflant. Il prouve que les hommes du monde entier savent encore s’allier pour construire des projets pharaoniques. Les objectifs d’ALMA sont à la mesure du gigantisme, comme observer en profondeur les disques protoplanétaires, ou suivre le processus de création d’une planète et détecter la composition de son atmosphère !

 

télescopes dans le désert d'Atacama

Source : Instagram

 

La Terre est un vaisseau spatial confortable qui fonce dans un univers glacé et hostile ; on sait maintenant qu’elle continuera son voyage quelques milliards d’années sans encombre, avant la fin du soleil, …avec ou sans les hommes. C’est à eux seuls de mettre en place les conditions de leur survie à bord de ce vaisseau, comme n’importe quel autre colonisateur. Pour l’instant, sur le plan de l’adaptation à l’environnement,  il faut admettre que les vers de terre et les dauphins ont fait bien mieux que les hommes, qui s’évertuent à détruire leur propre habitat ! L’intelligence fera-t-elle la différence en ménageant la paix et le partage, ou bien l’humanité fera-t-elle « pschitt » pour leur céder la place ? 

Les résultats d’ALMA ne fabriqueront jamais des montagnes d’or, mais l’enthousiasme des équipes, la portée philosophique du projet, l’honnêteté et le respect mutuel qui font force de loi dans les bases vie, tout cela forme un modèle d’harmonie internationale tout à fait saisissant, une véritable bouffée d’optimisme en faveur de la survie de notre espèce.

 

Par

Jean-Luc Wibaux