Lviv, Odessa, Kiev : un triptyque idéal pour découvrir l’Ukraine. Trois cités riches de leur histoire pour raconter un seul et même présent. Celui d’un vaste territoire longtemps sous tutelle russe aujourd’hui nourri d’influences occidentales.
Lviv l’élégante
Et si le train était la meilleure façon d’arriver en Ukraine ? Par la gare centrale de Lviv, par exemple, ville impériale et royale, marquée par un héritage polonais et austro-hongrois. L’ancienne capitale de la Galicie a gardé de cette histoire une atmosphère singulière. Des églises en pagaille, pour toutes les confessions – celle des Arméniens, avec son décor Art Nouveau, est spectaculaire ; un “corso”, artère indispensable à la sociabilité sous l’empereur François-Joseph Ier ; ou encore le Grand Théâtre, sorti de l’esprit du Polonais Zygmunt Gorgolewski, directeur de l’école supérieure des Arts et de l’Industrie, à la fin du XIXe siècle, lorsque la ville s’appelait encore Lemberg, la dotant d’une scène de niveau international.
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Dans l’incontournable restaurant de la famille Baczewski, qui fonda en 1782 la première usine de production à échelle mondiale de vodka, la nostalgie Mitteleuropa de la fi n du XIXe siècle perdure. On y croise les fantômes de Joseph Roth, l’auteur du chef-d’œuvre La Marche de Radetzky (1932) ; celui de Leopold von Sacher-Masoch (La Vénus à la fourrure, 1870) ou encore de l’artiste et critique littéraire Bruno Schulz. Au fil du temps, la ville s’est taillé une belle réputation en matière de restaurants, bars et salons de thé originaux, décalés, voire même exotiques. La place du marché, ou place du Rynok, regorge d’adresses gastronomiques indispensables, comme le Lviv Coffee Manufacture, où décoration, café et chocolat, enfoncent le clou… viennois.
Odessa : la ville-plage
Pour changer d’atmosphère, direction Odessa et la mer Noire (à environ quatre heures de vol depuis Lviv). En haut de l’escalier monumental sur lequel Sergueï Eisenstein a tourné une scène fameuse du Cuirassé Potemkine, se trouve la statue du premier gouverneur de la ville, de 1803 à 1814, le Français Armand-Emmanuel du Plessis de Richelieu. À se promener ici, on constate cette fois l’empreinte russe dans la conception et l’architecture, dans la rémanence de Casse-Noisette (le ballet de Tchaïkovski, 1892) sur les scènes municipales… Plus proche de nous, on se souvient que Joann Sfar avait choisi de situer une bonne partie de sa BD Klezmer (cinq tomes, 2006-2014) à Odessa… Une œuvre de circonstance, donc, à lire sur la plage – où les bains de mer se font dans une sympathique cohue, entre promiscuité et dégustation de pirojki, que l’on peut acheter un peu partout à Odessa. Idem pour le café ! Odessa voue une véritable passion à la culture du café. Les baristas rivalisent d’audace et leurs latte macchiatto n’ont rien à envier à ceux dégustés en Italie ou dans tout autre capitale répondant à la tendance…
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Kiev : millénaire et résistante
Des rails encore mènent à Kiev. De la Rus’ (berceau de la Russie actuelle et de l’Ukraine) qui, aux Xe et XIe siècles, s’étendait de la Baltique à la mer Noire, aux mouvements enflammés de la révolution du Maïdan, place de l’Indépendance, une partie de l’histoire ukrainienne s’est jouée ici. On flâne alors sur les rives du Dniepr qui se transforment l’été venu en plages animées. On croise les palais de l’époque impériale, diverses réalisations soviétiques et les grands compounds religieux construits sous Iaroslav le Sage (978-1054) : la cathédrale Sainte-Sophie et la laure des Grottes. La première, baroquisée au XVIIIe siècle, désormais muséifiée, possède encore de splendides fresques et mosaïques médiévales. Des moines venus du mont Athos ont fondé la laure – monastère où l’on mène une vie entre cénobitisme et érémitisme.
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Ville au patrimoine historique fort, Kiev n’en est pas moins moderne et chaleureuse. Les quartiers de Podil ou Pechersk, dans le centre-ville, concentrent les meilleurs restaurants, les attractions culturelles et les bâtiments à l’architecture post-soviétique. Depuis quelques années, Kiev, tel un nouveau Berlin, développe une urbanité trendy, street-art, à la vie nocturne plus ou moins underground… Rue Reitarska, l’une des plus hype, on shoppe des pièces streetwear et on dîne chez Zigzag. Comme Odessa, la ville regorge aussi de nombreux coffee-shops (Kashtan Coffee, 16.coffee, Right Coffee Bar…). Un coup de jeune bienvenu pour “la mère de toutes les villes russes”.
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