Naviguer sur le lac Nasser à la découverte des temples nubiens : une douce façon de prolonger la navigation sur le Nil.
Beaucoup de voyageurs referment leurs bagages aux portes de la Nubie, comme si le Nil commençait de couler à Assouan. Pourtant, le barrage inauguré en 1970, quelques semaines après la mort de son initiateur Gamal Abdel Nasser, n’empêche pas de poursuivre le voyage, mais constitue un simple trait d’union entre deux chapitres. Le premier chapitre débute au Caire, cette « New-York saupoudrée de sable » puis se déploie à Louxor, dans les jardins du Winter Palace où traînent encore les ombres des premiers égyptologues de la Thèbes antique. Hercule Poirot vous embarque ensuite à bord du Steam Ship Sudan, pour une expérience mythique sur un bateau bientôt centenaire. Le rythme est soutenu, ponctué par la visite des sites majeurs de Haute Egypte, sur des rives bouillonnant de cultures.
© Olivier Romano
Le deuxième chapitre s’ouvre à Assouan : l’embarquement sur le Kasr Ibrim marque un véritable changement de décor. L’imposant navire (79 m et 55 cabines) inauguré en 1997 reproduit néanmoins une ambiance Art déco. Les volumes sont spacieux dans les salons, le restaurant, les cabines et les suites (140 m2 pour la plus grande). Avec sa cousine l’Eugénie, plutôt Belle Epoque, le Kasr Ibrim compte parmi la dizaine de navires autorisés à naviguer sur le lac. Un lac aux airs marins, tant ses rives sont distendues : un accordéon de 500 km de long. La navigation y tient un rôle plus important que sur le Nil. Quatre à cinq heures par jour, on vogue sur cette « mer en plein désert », avec en tête le souvenir des paysages engloutis par le détournement du fleuve. Sur les rives désertiques, on découvre les temples déplacés. Soudain un mirage de pierre. Pour en voir le cœur net, on saute dans une chaloupe blanche avant de poser ses pieds nus sur le sable brûlant, avec l’impression d’être les premiers à marcher sur Wadi Es-Seboua, Dakka et Amada.
Le contraste avec les essaims touristiques de Karnak est stupéfiant. Au delà de la beauté des sites, on admire les différentes techniques de découpage et déplacement bloc à bloc de ces temples. Alors que le lac se rétrécit, quatre colosses pointent en ligne de mire. L’apparition d’Abou Simbel marque l’aboutissement de ce voyage onirique.
Photographies
JÉRÔME GALLAND