Elles sont vertes ou bleues, rebondies dans l’archipel de la Société ou irrémédiablement plates, posées à fleur de lagon aux Tuamotu. Qu’elles s’appellent Bora-Bora à l’origine du mythe ou Hiva Oa dans les lointaines Marquises, chaque île de Polynésie est un voyage unique.
Archipel de la societé : la naissance du mythe
C’est l’archipel phare de la Polynésie. Celui que l’on a pointé en premier sur son planisphère d’enfant. Un ensemble d’îles volcaniques hautes, « Sous le Vent » et « du Vent » ceinturées de lagons. D’abord Tahiti, celle où le voyageur pose généralement son premier pas, à l’aéroport Faa’a de Papeete, capitale à taille humaine. Un plongeon immédiat dans l’ambiance : parfum des colliers de fleurs de tiaré, notes de ukulélé, sourires et roulements de « r » des Polynésiens. Alors on file à Bora Bora, quintessence du lagon et du bungalow sur pilotis, une irrésistible invitation à vivre suspendu entre ciel et océan. Un saut de puce et Moorea, l’île cœur, ouvre ses jardins. On flâne à vélo, s’autorise un stop au comptoir d’une « roulotte » pour déguster son premier poisson cru à la tahitienne, et au couchant : direction le spa pour se délecter d’un massage à pulpe de coco. L’archipel de la Société a aussi ses perles discrètes. Raiatea « l’île sacrée » dont le marae (lieu de culte) est un témoignage puissant de la civilisation polynésienne. Tahaa, « l’île vanille » au charme préservé, mais aussi Maupiti à la douceur d’antan, ou encore Huahine, secrète et féminine.
Archipel des tuamotu : une histoire d’eau
Sur ce collier d’atolls fins égrainés entre ciel et Pacifique, la terre n’est qu’une fine ligne pointillée bordant les profondeurs. Parmi ces « îles lointaines », Rangiroa est un pur nirvana pour les plongeurs. Le « vaste ciel », comme l’appellent les Polynésiens, offre un lagon de 70 kilomètres de long, le deuxième plus grand au monde, où l’île de Tahiti tout entière pourrait s’imbriquer. Chacune de ses deux passes, larges et profondes, abrite une faune marine extrêmement variée. Il suffit d’ailleurs de chausser palmes, masque et tuba et de se laisser glisser en surface pour voir napoléons, poissons-perroquets, et clowns assurer le spectacle. Plus bas, dans les profondeurs du Moana, le grand bleu polynésien : requins Tapete, raies manta, dauphins et barracudas attendent dans le courant les plongeurs aguerris. Si dans toute la Polynésie l’océan est intimement lié à la vie, offrant de fabuleuses rencontres comme celle des baleines à bosse à Rurutu (archipel des Australes), les Tuamotu représentent fièrement cette osmose avec la mer. Entre pêche, surf, Va’as (traditionnelle pirogue à balancier) mais aussi culture perlière, l’une des principales ressources de l’archipel, ici l’homme se fond dans un écosystème fragile.
Archipels des marquises : la terre des hommes
À près de 1 500 kilomètres de Tahiti, l’archipel des Marquises dresse ses forteresses vertes contre l’indigo du Pacifique. La nature brute de ces douze îles laisse peu de place aux plages de sable noir, préférant les vallées où galopent les chevaux sauvages. Le climat, tempéré par les alizés, est moins conciliant qu’ailleurs. Pourtant, « gémir n’est pas de mise, aux Marquises » résumait si bien Jacques Brel. Ce n’est pas un hasard si le chanteur du plat pays choisit d’y passer les dernières années de sa vie, puis d'y reposer pour l’éternité, au cimetière d’Atuona, sur Hiva Oa. À ses côtés, le peintre Paul Gauguin fut lui aussi inspiré par les couleurs éclatantes des Marquises, dès la fin du XIXe siècle. Premier archipel colonisé par les Maohis 900 ans avant Jésus-Christ, situé à près de 5 000 kilomètres du premier continent, l’archipel marquisien s’aborde par la mer. En voilier dans le sillage d’Eric Tabarly, ou à bord de l’Aranui, un cargo qui en 6 jours au départ de Papeete, relie et ravitaille « la terre des hommes » comme les Marquisiens désignent leur archipel.
Les bonnes raisons d’aller en Polynésie
Pour vérifier si toutes les nuances de bleu de l’eau, qui semblent ne pouvoir exister que retouchées, sont bien vraies (on s’aperçoit que oui, et que l’eau peut se faire aussi rose, verte, mauve, violette…).
Parce que la température de l’eau y est égale à la température de l’air, et que l’air y est chaud.
Parce que chaque île est différente, chaque île est attachante.
Parce que la terre est ronde et qu’on peut aller plus loin, c’est à la fois aux antipodes et loin de tout, ici est l’ailleurs extrême.
Photographies
VERONIQUE DURRUTY